Des Oratoriens méditent la Bible – Luc Forestier (30.12.2016)
1ère lecture du vendredi 30 décembre 2016.
Fête de la sainte Famille
1ère lecture du vendredi 30 décembre 2016.
Fête de la sainte Famille
Le Seigneur glorifie le père dans ses enfants, il fortifie le droit de la mère sur ses fils.
Celui qui honore son père expie ses fautes, celui qui glorifie sa mère est comme quelqu’un qui amasse un trésor.
Celui qui honore son père trouvera de la joie dans ses enfants, au jour de sa prière il sera exaucé.
Celui qui glorifie son père verra de longs jours, celui qui obéit au Seigneur donne satisfaction àsa mère. […]
Mon fils, viens en aide àton père dans sa vieillesse, ne lui fais pas de peine pendant sa vie.
Même si son esprit faiblit, sois indulgent, ne le méprise pas, toi qui es en pleine force.
Car une charité faite àun père ne sera pas oubliée, et, pour tes péchés, elle te vaudra réparation.
(Ben Sira le Sage, ou Ecclésiastique, 3, 2-6.
Le choix de cette lecture semble évident le jour où l’Église fête la sainte Famille, tournant nos regards vers le lieu où le Verbe fait chair, inaugure son existence. La tradition ecclésiale a beaucoup médité sur la singularité de cette Famille, unique àplusieurs titres. Et la convergence semble naturelle entre naissance de Jésus et contemplation de sa famille.
En réalité, les liens entre ce bref passage du livre de Ben Sira le Sage et le mystère de l’Incarnation sont beaucoup plus profonds. En effet, nous sommes situés aux confins de l’Ancien Testament, avec un livre rédigé en gros 150 ans avant la naissance de Jésus. Ce livre est d’ailleurs absent des bibles en usage dans le protestantisme, car il n’a pas été reçu dans le groupe des livres reconnus par ce judaïsme qui se structure après le christianisme. Nous sommes plongés par lui dans la société multiculturelle que Jésus a connue dès son enfance, une société structurée par la tradition d’Israël et traversée par de fortes influences grecques. À cela, il faut rajouter une situation politique passablement troublée, et on comprend àquel point la question de l’identité est prégnante dans la vie, dans l’enseignement et dans les gestes de Jésus.
Notre lecture d’aujourd’hui est un bon témoin de cette transaction, avec un effort d’explication et d’actualisation du patrimoine ancien dans une société nouvelle. La mention du rapport entre parents et enfants est ici une relecture de l’une des Dix Paroles, ou dix commandements. Vous trouvez ce passage dans la Bible ouverte devant vous, en Exode 20, 12 : « Honore ton père et ta mère, afin que se prolongent tes jours sur la terre que te donne le Seigneur ton Dieu. » L’auteur du passage que nous lisons développe largement ce que signifie honorer ses parents, avec une promesse liée àce juste rapport avec ceux de qui nous tenons la vie. Mais il y a une véritable insistance sur la question de la santé, en rappelant subtilement àceux qui sont jeunes qu’ils connaîtront sans doute la vieillesse. Sur ce point de détail, c’est la question de la flèche de l’histoire que la tradition d’Israël vient rappeler àune tradition grecque centrée sur la contemplation des Idées éternelles.
Lire aujourd’hui ce passage nous oblige àcontinuer le geste initié, c’est-à-dire rappeler ànotre monde de l’immédiateté l’épaisseur d’une histoire qui nous structure. Et cela conduit àcombiner l’attention ànotre société métissée et la relecture de la Parole qui nous rassemble.
Luc Forestier, prêtre de l’Oratoire àParis