C’est en général début novembre que commence « Noël », vaste ensemble d’opérations commerciales et de négociations familiales, d’angoisse pour trouver la bonne idée pas trop chère et d’incertitude sur la manière de traverser cette période parfois complexe. La vie liturgique de l’Église nous prépare àNoël avec une autre pédagogie, assez curieuse en réalité. « Avent », c’est-à-dire « ce qui va venir », montre bien cet heureux décalage avant Noël. Pour le dire d’un mot, tous préparent Noël, les chrétiens attendent l’avènement de Dieu.
Il ne faut sans doute pas majorer l’écart entre la préparation et l’attente, mais attendre comporte toujours une part de risque et d’altérité. Qui attendons-nous ? Comment attendre Celui qui vient ? Qu’est ce qui, en nous, attend vraiment ? Cette expérience de l’attente, que chaque anamnèse manifeste – il était mort, il est vivant, il reviendra dans la gloire – est nourrie par le livre d’Isaïe, parfois qualifié de « cinquième évangile », lu pendant l’Avent.
Des grands prophètes, et même des petits, Isaïe nous est sans doute le plus familier, et nous aimons entendre certains passages qui structurent notre vie chrétienne, comme le soir de Noël, « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ». C’est Isaïe que nous traverserons pendant ces trois prédications, ce qui nous permet de communier àl’attente qui structure l’expérience du peuple d’Israël.
En effet, c’est peut-être pendant l’Avent que nous sommes les plus proches d’Israël comme peuple de Dieu, attendant avec lui l’avènement de Dieu, même s’il y a pour nous un profond renouvellement en Jésus-Christ. Cette permanence d’Israël jusqu’àaujourd’hui, signe extrêmement concret de l’amour et de la fidélité de Dieu, constitue une grâce pour les chrétiens. Par le rappel permanent d’une altérité au cœur de la vocation chrétienne, le peuple d’Israël nous permet de goûter le temps d’attente comme une communion àl’humanité du désir et de la rencontre. En effet, nous attendons toujours àplusieurs, et c’est déjàle temps de la rencontre.
Luc Forestier, prêtre de l’Oratoire, directeur de l’Institut Supérieur d’Études Œcuméniques (Institut Catholique de Paris)