Enfin nous y voilàNoël est tout proche… si proche que presque là. Après un avent 2018 qui aura été agité et marqué par la violence dans notre société, nous sommes sur le point d’entrer dans le cycle de la Nativité-épiphanie, deux mots qu’on aime àne pas trop séparer. « Nativité », c’est àdire « advenue », par la grâce de la naissance. « Épiphanie » c’est àdire « manifestation » car l’enfant qui vient au monde ne va plus rien faire d’autre que de se donner àconnaître àceux et celles qui vont le suivre en sa vie puis, plus tard, àses disciples qui le connaîtront par la foi. Au delàde lui-même, il va aussi donner àconnaître le mystère de Dieu dans un langage inédit et inouï : en prenant corps et visage d’homme, en habitant une humanité singulière pour aller àla rencontre de l’humanité entière et de chacun et chacune de ceux et celles qui la composent. C’est làtout ce que nous avons àcélébrer et àpartager en ces jours de fin d’année.
La nuit de Noël est hospitalière. Elle raconte une histoire que tous peuvent entendre : l’histoire d’une naissance. L’évangéliste, àla messe de la nuit, se fait conteur : « En ce temps-là, parut un décret de l’empereur César-Auguste ordonnant de recenser toute la terre… ». Dans le tableau il met les sans-grades aux premières loges : ce sont les bergers, premiers avertis de ce qui arrive par des messagers célestes. Il donne aussi le texte du chant des anges : « Gloire àDieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime ! ». Enfin il conduit son auditeur àl’humble crèche où l’on trouve le cœur de l’histoire, ramené àl’essentiel : l’enfant nouveau-né, sa mère Marie et son père, Joseph…
L’enfant… : on peut y voir une image de la fragilité. C’est la première évidence. Mais il ne faut pas manquer d’y voir aussi l’extraordinaire capital de virtualités, de possibles, qui ne sont pas encore révélés mais qui sont bel et bien là. L’enfant – l’Enfant de Bethléem singulièrement – est tout entier avenir. Il grandira et croisera les pas de tant de gens. Il n’ignorera personne. Il parlera aux gens et leur fera du bien. Il ne fera que le bien.
Ceux et celles qu’il rencontrera, que leur dira-t-il ? Essentiellement, il les rappellera àleur à-venir. Tous en effet font l’expérience de l’usure de la vie : soit que les circonstances extérieures soient dures et adverses soit que les équations plus personnelles, intérieures, intimes n’aillent pas de soi. On peut être fatigué du présent et tenté d’esquiver l’avenir. On peut passer son présent àse raconter un passé re-composé, histoire de se rassurer àpeu de frais.
Mais Jésus n’est pas homme de nostalgie. En lui, plus encore qu’en tout autre, résonne l’appel jadis adressé àAbraham : « Lève toi et va vers toi-même ».
Jésus entraîne ceux et celles qui croisent ses pas dans ce même mouvement vers : vers Dieu, vers les autres et vers soi-même, dans une confiance sans cesse renouvelée en l’appel de Dieu. A ceux et celles qu’il rencontre, il lance toujours l’invitation : « suis-moi ! ». Chacun en fait ce qu’il peut ou ce qu’il veut.
L’actualité ne nous laissant jamais de répit, nous entrons dans ces fêtes de Noël 2018 avec des images de violence – notamment celles des dernières semaines àParis – qui laissent toujours des traces et un certain trouble. Puissent ces célébrations être pour tous une oasis de paix et, peut être de réflexion pour retrouver le goût de construire un vivre-ensemble heureux.
Noël : non pas l’échappatoire d’une « belle histoire » illusoire, non plus que la parenthèse d’une paix rêvée ou fantasmée… Noël : une brèche dans la nuit, une lumière douce et pacifiante dans les obscurités de l’histoire troublée des hommes. Un moment où terre et ciel se rapprochent. Un moment où se donne àvoir un Dieu àvisage humain.
« La gloire de Dieu c’est l’homme vivant », disait st. Irénée (2ème siècle). Tous les hommes de bonne volonté peuvent le chanter : « Gloire àDieu au plus haut des cieux ! et PAIX sur la terre aux hommes qu’il aime ! »
Joyeux et paisible Noël àtous !
Gilles-Hervé Masson, dominicain, vicaire de Saint-Eustache
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