« Il n’est pas nécessaire d’attendre d’être réconciliés en tout point pour participer ensemble àla mission du Fils » Nous sommes prévenus : « Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé. Et moi, je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes UN : moi en eux, et toi en moi. Qu’ils deviennent ainsi parfaitement UN, afin que le monde sache que tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé. » La crédibilité du témoignage chrétien est liée àl’unité dont les disciples de Jésus peuvent se prévaloir. Chacun peut chercher àtémoigner de la résurrection de Jésus. Si nous ne le faisons pas aussi ensemble, c’est vain ! C’est la raison pour laquelle le concile panorthodoxe de Crête nous concerne, la préparation du 500° anniversaire des débuts de la Réforme nous concerne, la rencontre du pape François et du patriarche de Moscou àCuba nous concerne, celle de François et du patriarche Barthélémy sur l’île grecque de Lesbos pour interpeller les européens sur la tragédie des réfugiés nous concerne.
Rares sont les associations organisées œcuméniquement comme l’
ACAT qui associe prière et action pour l’abolition de la torture et la peine de mort, et pour la défense du droit d’asile, seule issue pour les personnes menacées par les deux premiers fléaux.
À quelle démarche nous appelle l’Esprit àtravers ces événements œcuméniques ? La prière de Jésus «que tous soient un » tourne nos regards vers son action au sein de l’Église de Dieu. En effet, dans la 1° Lettre aux Corinthiens de Saint Paul, l’Esprit est àla fois celui qui distribue les charismes et celui qui les donne en vue de la construction du Corps du Christ qu’est l’Église de Dieu. Or, aujourd’hui la situation de l’Église correspond toujours àcelle que décrivait Yves Congar en 1982 : « Aucune Église n’est parvenue àconvaincre les autres que sa position s’impose comme celle de la vérité. Ni l’Église orthodoxe et sa constante affirmation qu’elle est la solution de tous nos problèmes, n’est arrivée àconvaincre les autres que c’est làqu’il faut (re)venir. Ni l’Église catholique n’est arrivée, malgré des monceaux d’arguments, àconvaincre de son dogme papal. Ni les protestants, malgré leur science et la vitalité de leur foi en Jésus-Christ Sauveur, n’ont convaincu qu’ils sont l’Église réformée. Ni l’Église anglicane, malgré son propos d’unir Réforme et Catholicisme traditionnel, n’a été effectivement cette Église-pont qu’elle dit être. Nous sommes encore les uns en face des autres, les uns àcôté des autres, bien que nous soyons aussi, àquelque degré, les uns avec les autres et même les uns dans les autres. »
Des termes proches de ceux du chapitre 17 de l’évangile de St Jean. Comment approfondir le degré de communion pour apparaître « comme un peuple rassemblé dans l’unité du Père, du Fils et de l’Esprit-Saint » (LG 4). Faute de participation commune àla mission que le Fils a reçue de son Père, les Églises agissent surtout les unes àcôté des autres, sans parvenir àarticuler ensemble les charismes dont chacune est porteuse.
Rares sont les associations organisées œcuméniquement comme l’
ACAT qui associe prière et action pour l’abolition de la torture et la peine de mort, et pour la défense du droit d’asile, seule issue pour les personnes menacées par les deux premiers fléaux. Pourtant, portée par le souffle de l’Esprit, l’ACAT atteste que les chrétiens peuvent déjàincarner ensemble la puissance de l’amour de Dieu en raison de leur foi commune en la résurrection du crucifié, selon un œcuménisme de moyens àdistinguer de l’œcuménisme de finalité dont l’objectif est la communion des Églises.
Puisque le baptême nous fait entrer dans le Corps du Christ qu’est l’Église de Dieu, puisqu’au sein de ce Corps, « ce qui nous unit est plus grand que ce qui nous divise », puisque la vie de l’Église est réponse au don de Dieu que Dieu offre àl’humanité dans la personne de son Fils, il n’est pas nécessaire d’attendre d’être réconcilié en tous points pour participer ensemble àla mission du Fils. Approfondissons la qualité de notre réponse en développant ce qui est déjàrendu possible par l’action de l’Esprit.
Ensemble, les baptisés peuvent déjàse reconnaître comme « donnés par le Père àson Fils » pour participer àsa mission dans le souffle de l’Esprit. Ensemble, les baptisés peuvent déjà« contempler [l]a gloire [du Christ] » qui nous attend : il nous précède sur tous les terreaux humains, comme sur l’île grecque de Lesbos. Ensemble nous pouvons approfondir une compréhension de Dieu, de l’humanité et du monde en réponse àla révélation de Dieu en Jésus-Christ que les Églises ont reçue grâce àleur rencontre avec l’Écriture. Ensemble, nous pouvons incarner la bonté de Dieu, si nous le voulons…
François Picart, prêtre de l’Oratoire