Placée au cœur des préoccupations de l’Eglise par le pape François, pour qui « le chemin de la synodalité est celui que Dieu attend de l’Eglise au troisième millénaire », la notion de synodalité reste souvent assez vague pour beaucoup de chrétiens. C’est la raison pour laquelle Luc Forestier, prêtre oratorien, cosigne avec Isabelle Morel et Dominique Barnérias, tous trois enseignants au Theologicum de l’Institut catholique de Paris, un Petit manuel de synodalité. Partant de son origine jusqu’àson sens actuel, cet ouvrage donne des clés pratiques àtous ceux qui souhaitent accompagner ou simplement mieux comprendre l’actuel Synode des évêques, comme nous l’explique Luc Forestier.
La synodalité est-elle un sujet qui s’impose dans l’Eglise aujourd’hui ?
La synodalité ne date pas d’aujourd’hui, le renouvellement auquel nous participons dans l’Eglise est le fruit direct de Vatican II mais il est vrai que nous sommes en train de vivre une nouvelle étape. Le pape François met l’Eglise en mouvement dans la société actuelle, puisque la synodalité signifie littéralement marcher ensemble. Mais si ce n’est que le pape qui le veut, cela n’aura pas l’effet escompté. Le but est que tous les chrétiens entrent en mouvement. La question que nous pouvons nous poser, c’est pourquoi une telle actualité de la synodalité alors que la mission, elle, est constante ? Bien qu’il s’agisse toujours d’annoncer la Bonne Nouvelle de l’Evangile et du Christ ressuscité, le monde àqui l’annonce s’adresse, change. Donc les missions s’exercent de manière très différente selon les époques. D’où l’idée d’avoir conçu ce livre comme un manuel, c’est-à-dire un outil, un livre utile àun moment donné. C’est un facilitateur, il a été écrit pour faciliter la vie des personnes. Il a également été écrit àsix mains, car l’idée est née d’une discussion avec mes collègues, c’est vraiment une expérience plurielle et nous nous en réjouissons car ce serait presque une contradiction de parler seul de synodalité !
De grands sujets de société semblent intrinsèquement liés àla synodalité, comme l’écologie. L’avenir des sociétés passe-t-il forcément par plus de synodalité ?
 Nous sommes actuellement face àde telles transformations sociétales, dans le domaine de l’écologie, de l’égalité entre les hommes et les femmes, des rapports de forces liés àla mondialisation, de la relation au monde animal, et de la question des identités, que nous avons besoin de lieux d’expression et d’échanges. Le premier besoin de la synodalité est de s’adresser au monde dans lequel nous vivons. A qui voulons-nous parler et qu’est-ce que notre société est prête àentendre ? La synodalité vient de la mission, de l’annonce dont nous sommes chargés. La synodalité ecclésiale ne vient qu’après la nature de la mission et le monde dans lequel nous vivons.
N’y a-t-il pas un conflit entre la synodalité et les libertés individuelles au cœur des aspirations actuelles ? Est-ce conciliable ?
Je vais prendre l’exemple de la montagne. Quand on en fait en groupe, ceux qui sont en tête ont tendance àvouloir aller de plus en plus vite, àl’opposé des derniers, qui avancent de moins en moins vite. Mais nous sommes en groupe, dépendant les uns des autres et non simplement des individus les uns avec les autres. Seulement, lorsque nous vivons une telle expérience, nous nous rendons compte que ce n’est pas naturel, et que cela demande un apprentissage.
Que nous soyons en montagne, en famille, dans une équipe d’action catholique ou dans une congrégation religieuse, nous marchons ensemble et devons forcément àun moment donné adopter une position d’écoute, y compris quand les conditions ne sont pas bonnes. Pour reprendre l’exemple de la montagne, les difficultés peuvent être majorées par le mauvais temps et le sentiment de peur. Beaucoup de choses nous font croire que nous sommes plus heureux tout seul, mais l’expérience de la pandémie nous a montré l’inverse.
Or, dans la vie chrétienne, nous ne sommes jamais seuls. En synodalité ou en liberté, c’est l’Esprit Saint qui est au travail. Il est commun àtous et particulier àchacun. Il peut créer une vie commune alors que nous avons des aspirations différentes. On le voit bien dans les lieux où on expérimente l’Esprit Saint : les instances de discussion, la liturgie, l’écoute des plus démunis, de ceux àqui on ne donne pas la parole. Même lorsque les aspirations sont différentes, même lorsque des conflits d’opinion s’expriment, c’est le travail de l’Esprit Saint qui peut concilier les aspirations de chacun, pour nous faire marcher ensemble.
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