Il nous est donné ce 6 mai d’accueillir àSaint Bonaventure, un groupe d’universitaires qui, en langue française, lui rendent hommage àl’occasion des 800 ans de sa naissance. C’est une chance de mieux nous approprier le trésor de la pensée de cet homme qui peut nous aider àrelever les défis que nous traversons. Je n’ai que peu étudié les écrits de ce théologien, mais l’homme et le chrétien suscitent le respect.
À sa mort un témoignage donne le ton : « C’était un homme bon, affable, pieux et miséricordieux, plein de vertus, aimé de Dieu et des hommes… En effet, Dieu lui avait donné une telle grâce, que tous ceux qui le voyaient étaient envahis par un amour que le coeur ne pouvait pas cacher ».
Jean da Fidanza, dit Bonaventure, est un des plus grands esprits de son temps qui semble avoir été làau bon moment. J’ai appris àaimer cet homme car il a su accepter des responsabilités lourdes àporter sans jamais faillir de son chemin de disciple du Christ, que ce soit dans la recherche universitaire, la gouvernance des hommes et le service de la communion. Cet homme ayant reçu de grands talents a su rester un humble serviteur de ces frères.
Il rêvait d’une vie entièrement fondée sur l’étude et la recherche universitaire ? Ayant rejoint l’ordre des frères mineurs àParis et ayant brillamment réussi sa thèse doctorale axée sur une approche christologique, voilàqu’il est élu ministre général des frères mineurs, l’ordre fondé par François d’Assise. Il sera au service de 30 000 frères répartis dans tout l’occident médiéval et même en Afrique, au Moyen-Orient ou àPékin. Comment faire vivre ce grand corps qui risque de disloquer entre les « spirituels » – partisans de la pauvreté absolue – et les « conventuels » orientés vers une évolution de l’ordre, qui se devait de prendre en considération les questions nouvelles fleurissant dans le monde universitaire ? Le défi était de taille. Bonaventure s’efforcera pendant 17 ans de donner une cohérence interne àce corps en lui donnant les moyens de perdurer. Nous lui devons une vie de François d’Assise qui deviendra la biographie de référence. À l’égal de Thomas d’Aquin, Bonaventure n’a pas peur de s’aventurer dans le questionnement tel que la pratique la pensée scolastique, articulant foi et raison. Sa recherche est centralisée, àl’image de son maître François d’Assise, sur la connaissance du Christ. Elle prend en considération le mystère de l’incarnation et nous donne des points d’appui pour aujourd’hui repenser une anthropologie prenant en considération l’humain dans son environnement.
Il est frappant de voir combien le pape François le cite dans son encyclique « Laudato Si’ ». Sa venue àLyon enfin vous le savez est due àla convocation du deuxième concile de Lyon voulue par le pape Grégoire X afin de favoriser l’unité de l’Église déchirée par la rupture de 1054. Bonaventure y jettera toutes ses dernières forces jusqu’àson dernier souffle, le 15 juillet 1274. Si la tombe de Bonaventure a disparu, il nous reste sa pensée qui nous invite ànous laisser vitaliser par ce Christ, porte de notre humanisation. Comment n’aimerions nous pas cet homme qui a si bien aimé la France que ce soit àParis et Lyon ? Merci au frère André Ménard, au père Éric Mangin de la faculté de philosophie de l’Université Catholique de Lyon, àmadame Laure Solignac et ànotre archevêque Philippe Barbarin de nous donner de vivre ces heures qui réveillent une pensée orientée au service de nos frères.
Antoine Adam, prêtre de l’Oratoire, recteur de Saint-Bonaventure et chapelain de l’Hôtel-Dieu