1ère lecture du jeudi 9 août 2018
Voici venir des jours – oracle du Seigneur – où je conclurai avec la maison d’Israël (et la maison de Juda) une alliance nouvelle. Non pas comme l’alliance que j’ai conclue avec leurs pères, le jour où je les pris par la main pour les faire sortir du pays d’Égypte – mon alliance qu’eux-mêmes ont rompue bien que je fusse leur Maître, oracle du Seigneur ! Mais voici l’alliance que je conclurai avec la maison d’Israël après ces jours-là, oracle du Seigneur. Je mettrai ma Loi au fond de leur être et je l’écrirai sur leur cÅ“ur. Alors je serai leur Dieu et eux seront mon peuple. Ils n’auront plus àinstruire chacun son prochain, chacun son frère, en disant : « Ayez la connaissance du Seigneur ! » Car tous me connaîtront, des plus petits jusqu’aux plus grands – oracle du Seigneur – parce que je vais pardonner leur crime et ne plus me souvenir de leur péché.
Jérémie 31, 31-34
Méditation
La tradition chrétienne a toujours considéré ce texte de Jérémie comme un lieu essentiel pour comprendre l’articulation entre la première alliance avec Israël et la nouvelle alliance en Jésus-Christ. Cette articulation se joue dès le Nouveau Testament car Hébreux 8, 8-12 cite ce même passage de Jérémie, ce qui constitue la plus longue citation de l’Ancien Testament dans le Nouveau. En cette fête d’Édith Stein – sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix – la lecture de ce passage de Jérémie prend une couleur particulière, car nous fêtons celle qui resta fidèle àson judaïsme, jusque dans la mort àAuschwitz, tout en ayant découvert la nouveauté de la foi chrétienne jusqu’àêtre baptisée et entrer au Carmel.
Comment est-il possible d’être chrétien et de rester juif ? Édith Stein, comme tant d’autres avant et après elle, ont compris que leur appartenance au peuple d’Israël ne cessait pas avec le baptême. De la même manière, pour les autres chrétiens, c’est-à-dire pour la plupart, l’appartenance au paganisme ne cesse pas avec le baptême ! Ce n’est donc pas exactement le même chemin qui se dessine pour les païens devenus chrétiens, et pour les juifs devenus chrétiens.
L’existence de quelques juifs devenus chrétiens, ainsi que la permanence d’Israël, qui est un effet de la miséricorde de Dieu, et non un hasard de l’histoire, nous aident ainsi àcomprendre ce passage de Jérémie. De plus, la liturgie chrétienne nous permet de recevoir la Parole de Dieu qui en constitue le cœur. Elle nous donne de communier au sang de la nouvelle Alliance, c’est-à-dire au don de Jésus-Christ qui constitue, en sa personne même, cette alliance annoncée par Jérémie.
Cette alliance qui s’inscrit dans le cœur n’est pas une simple répétition de ce que vit Israël, ce qui alignerait Jésus sur les autres prophètes, mais un renouvellement radical. Pour Jérémie, l’action nouvelle que Dieu décide ne consistera pas àreformuler la Torah, mais àdéployer une pédagogie nouvelle. La Torah – que la traduction que nous utilisons désigne par le mot « loi », avec une majuscule pour en souligner l’importance – ne peut plus être réduite àune série de règles extérieures àl’homme, mais elle sera pleinement inscrite àl’intérieur de la chair humaine, ce que le cœur symbolise. De manière inattendue, cette nouvelle Alliance annoncée par Jérémie passe par la personne même de Jésus ! Le dessein de Dieu se concentre en quelque sorte sur une unique personne, membre du peuple d’Israël, et c’est dans sa vie et dans sa chair que la Torah prend corps.
Pour les païens, devenus chrétiens, la rencontre de Jésus est aussi la découverte de la Torah, mais àtravers sa personne même. En revanche, pour les juifs devenus chrétiens, Jésus est celui en qui la prophétie de Jérémie s’accomplit de manière plénière. Unis par la personne de Jésus-Christ, nous le sommes aussi par une miséricorde qui nous rassemble au service de l’humanité, dans la diversité de nos vocations.
Luc Forestier, prêtre de l’Oratoire àParis