« Quand tu étais sous le figuier »
Méditation biblique de Jean-Pierre Rosa
Méditation biblique de Jean-Pierre Rosa
Évangile du mercredi 24 août 2022
Philippe trouve Nathanaël et lui dit : « Celui dont il est écrit dans la loi de Moïse et chez les Prophètes, nous l’avons trouvé : c’est Jésus fils de Joseph, de Nazareth. »
Nathanaël répliqua : « De Nazareth peut-il sortir quelque chose de bon ? »
Philippe répond : « Viens, et vois. »
Lorsque Jésus voit Nathanaël venir àlui, il déclare àson sujet :
« Voici vraiment un Israélite : il n’y a pas de ruse en lui. »
Nathanaël lui demande : « D’où me connais-tu ? »
Jésus lui répond : « Avant que Philippe t’appelle, quand tu étais sous le figuier, je t’ai vu. »
Nathanaël lui dit : « Rabbi, c’est toi le Fils de Dieu ! C’est toi le roi d’Israël ! »
 Jean 1, 45-49
« Quand tu étais sous le figuier »
Est-il possible d’ajouter quelque chose àla longue méditation d’Adrien Candiard sur ces quelques versets ? L’auteur dit avoir peu de goût pour les spéculations sur les significations symboliques du figuier. Il préfère souligner que Jésus fait allusion àun moment intime de la vie de Nathanaël, un moment décisif, peut-être ancien, où il a choisi d’aller vers son désir le plus infini – qui rejoint Dieu même -, et que Jésus vient lui rappeler.
Mais il n’est pas inutile d’ajouter que le figuier est, comme la vigne, une métaphore courante d’Israël. Les évangélistes reviennent souvent sur ce figuier dont on attend du fruit mais qui se trouve être stérile et que Jésus condamne àêtre desséché. Ces passages provoquent souvent l’étonnement du lecteur. On a beau se dire qu’un peuple neuf a remplacé Israël, on reste perplexe devant la violence et le caractère radical du jugement.
Reportons-nous chez Jérémie, au chapitre 24. Il y est déjàdécrit un jugement définitif entre deux corbeilles de figues. Les unes sont « bonnes, très bonnes », les autres sont « mauvaises, si mauvaises qu’elles sont immangeables ». Et le jugement tombe, inexorable. « Comme on apprécie ces bonnes figues, j’apprécierai les déportés de Juda que j’ai expulsés de ce lieu au pays des Chaldéens. (…) Je leur donnerai un cœur qui me connaisse, car je suis le Seigneur ; ils seront mon peuple, et moi, je serai leur Dieu, car ils reviendront àmoi de tout leur cœur ».
« Comme on traite les mauvaises figues, si mauvaises qu’elles sont immangeables – ainsi parle le Seigneur – je traiterai Sédécias roi de Juda, ses princes et le reste de Jérusalem, ceux qui sont restés dans ce pays et ceux qui habitent au pays d’Égypte ; je ferai d’eux un objet de stupeur, une calamité pour tous les royaumes de la terre… » Nous ne sommes pas très loin de l’atmosphère du jugement dernier de Matthieu qui met en scène non pas des figues mais des brebis et des boucs. Ceux qui font le bien sans y penser et ceux qui disent et pensent le bien mais ne le font pas.
Pourquoi rapprocher ces textes ? Parce que Jésus parle d’un Israélite dans lequel « il n’y a pas de ruse ». Ceux qui « disent et ne font pas » àl’abri de la loi (une autre métaphore du figuier) sont pleins de ruse. Nathanaël, lui, s’est mis àl’abri de la loi, s’en est inspiré mais c’est un homme droit, sans ruse.
Et il proclame aussitôt la messianité de Jésus. La scène ainsi éclairée a de quoi nous inciter àun examen de conscience.
Que recherchons-nous lorsque nous nous abritons sous le figuier ?
Jean-Pierre Rosa, paroissien de l’église Saint-Eustache
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Illustration : Philippe appelle Nathanaël, détail du Vitrail des apôtres, cathédrale de Chartres, 1210-1225