Sens & Conscience, le christianisme dans la modernité
Une collection dirigée par Robert Dumont, oratorien et ancien prêtre-ouvrier, aux éditions Karthala
Une certaine forme de christianisme semble définitivement périmée dans notre monde occidental, avant de l’être sans doute àplus ou moins brève échéance sur d’autres continents. Avant le Siècle des Lumières, la foi en Dieu s’imposait socio-logiquement et n’était remise en cause que par des minorités. Avec la modernité, qui revendique l’exigence de penser par sa propre raison dans un contexte de culture scientifique, les hommes ont commencé àdiscuter et àmettre en cause des vérités venant de la Tradition, religieuse ou non, et prônées par voie d’autorité. Cette démarche critique est passée de nos jours dans les mœurs. On a besoin de vérifier ce qui donne sens àson existence. Par ailleurs, « Dieu » n’étant plus une évidence ni une nécessité dans notre culture occidentale, nos sociétés s’organisent sans référence àDieu considéré autrefois comme la clé de voûte de toute institution, voire de toute pensée. Telle est la condition du chrétien moderne.
Les Églises ont souvent réagi en condamnant ceux qui s’essayaient àrepenser le christianisme et ses sources. Le précurseur de l’exégèse catholique, l’oratorien Richard Simon au XVIIe siècle, et plus près de nous les modernistes au début du XXe siècle ont fait les frais de la répression romaine. Depuis ces devanciers, beau-coup de penseurs et de théologiens catholiques ont été inquiétés jusqu’àtout récem¬ment. Malgré la désertion religieuse qui ne cesse de s’amplifier, certaines Églises dont la Catholique continuent de camper sur leurs positions doctrinales, les considérant comme la Vérité venue du ciel, sans admettre qu’elles ont été élaborées dans des cultures successives et avec les représentations des siècles passés.
Pour nombre de chrétiens et pour la majorité de nos contemporains, marqués par la culture de la modernité et donc du débat, il n’est plus possible d’adhérer àce qui n’a pas de sens dans la conduite de leur existence. La proposition d’un christia¬nisme dogmatique et moralisant, figé dans le marbre, manque de crédibilité et même certaines de ses prescriptions leur apparaissent dangereuses dans l’abord de situations dont les solutions renvoient aux choix responsables de chacun.
Ceux pour qui l’héritage chrétien garde sa valeur sentent la nécessité de le réinterpréter. Loin d’être iconoclaste, leur ambition est au contraire de manifester en notre temps la fécondité du témoignage de Jésus de Nazareth. Pour eux en effet, la fidélité àleur Tradition n’est pas répétition passive mais recréation dynamique dans le contexte culturel de leur époque. C’est au service de cette démarche que se veut la collection « Sens & Conscience. Le christianisme dans la modernité ».
Les ouvrages que regroupe cette nouvelle collection veulent aider les chrétiens às’approprier leur propre Tradition sans a priori ni tabou, en toute liberté de conscience et dans le respect des exigences de tout travail intellectuel. Ils permet-tront aux non-chrétiens de la comprendre au-delàdes clichés. Ces ouvrages auront pour objectifs :
–  de faire connaître àla lumière des recherches actuelles la signification des textes référents du christianisme : la Bible juive et les écrits du Nouveau Testament, trop souvent lus àla lettre ou avec des préjugés dogmatiques,
–  de mettre en lumière par des études historiques les élaborations successives du christianisme liées àleur contexte et de faire apparaître leur créativité et leur relativité,
- de mettre ainsi en relief le décalage entre la personnalité historique de Jésus – telle que les évangiles nous permettent de la percevoir –, et les doctrines successives construites àson sujet au détriment de son humanité,
- de faire une histoire critique des représentations de Dieu au cours de l’histoire judéo-chrétienne et de s’interroger sur un discours croyable sur Dieu par nos contemporains.
Cette collection n’a pas la prétention d’apporter la réponse àune expression de la foi pour le XXIe siècle mais elle entend poser des questions qui, depuis des siècles, n’ont eu que rarement audience dans l’Église. Il s’agira donc de donner la possibilité àdes auteurs de risquer leur pensée.
Parmi les quatre titres publiés àce jour, deux sont de l’évêque anglican américain John Shelby Spong, dont les ouvrages se vendent partout dans le monde àdes centaines de milliers d’exemplaires. L’ouvrage de Jacques Giri, dont la 5e édition en langue française est parue en janvier 2015, approche, quant àlui, les 3 000 exemplaires. Les premières ventes du livre de Jacques Musset, paru en octobre 2015, sont le signe qu’il répond aux attentes des lecteurs.
Robert Dumont, prêtre de l’Oratoire